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Tout n'est plus comme avant...



Toute ma vie, j'ai attendu le jour suivant. Le jour suivant n'est pas venu.Je voyais, en noir et blanc, des dunes plantées d'herbes raides et rondes sous le vent où des filles aux cheveux pâles et aux visages éclatants, couraient, solitaires vers le monde. Toute ma vie, j'ai attendu le jour suivant...C'est un terrain vague, la carcasse d'un bus incendié, du blanc autour comme de la neige. C'est le petit désert qui s'installe dans l'histoire. Il y a cette ombre qui tourne et qui retourne.

Le jour suivant n'est pas venu...
Je ne veux pas d'une vie misérable qui s'écroule un jour, je ne veux pas finir dans la rue, à la soupe populaire, dans un hospice, à gratter mes poux. J'imaginais l'univers comme un complexe système de vases communicants. Remplissant de miel celui de la bonté, j'attendais de récolter le trop plein de la chance, la chance est timide, j'en suis convaincu. Elle se dérobe si on l'approche avec maladresse.

Toute ma vie, j'ai attendu...
L'air est lourd, l'air est épais. Et j'entends le bruit des balles. Je distingue avec peine les arbres à lémuriens. Une scène défile sur l'écran. Un type qui se promène de nuit dans la ville, s'avance en sifflotant sur un pont. Et distingue dans la faible lumière des réverbères, une silhouette inquiétante et fragile, penchée sur le parapet, figée dans la contemplation du fleuve. Courant d’air fatal s'engouffrant, glaçant sa peau en sueur. Et plus que cela, glaçant tout...C'est le cri de l’iceberg que se sépare, la chute des harkis en tombant dans l'Arctique, entraîne soudain la montée des eaux. Pas d'écriture possible avec la lumière dans ces moments-là. Puisque ça se passe juste avant la lumière. Je crie, les fauvettes s'envolent, les poules d'eau quittent les fondrières de l'étang : quel soulagement. Je distingue avec peine les arbres à lémuriens. Il y a cette ombre qui tourne et qui retourne. Le jour suivant, Il y a cette ombre, il y a des problèmes, des frontières. Croiser la nuit, des douaniers à suborner. Il y a le visage des filles, avilies dans la simulation, avec leurs corps dans le jardin clos, dans les barrières de béton et de métal, et le béton abîmé montrant l'os comme une bête folle montre ses crocs. Et le métal rouillé et manque général de couleur, comme un non choix de couleur, comme la pauvreté avec. Il y a une dame en tailleur-pantalon, sa mise en plis très nette. Elle se tourne, c'est marrant, son visage aussi est tout blanc. Je l'entends. Il n'y a aucun bruit sauf, sa voix. Quelque chose n'est pas vraie, quelque chose sonne faux, c'est le petit désert qui s'installe dans l'histoire. Nous allons de ville en village, traquer l'améthyste qui permettrait à l'histoire de revenir en arrière. Je ne sais si ma place a changé.

Où sont les autres, ils n'arrivent pas...
Toujours pareil ici. Les jeunes assis devant un café ou une bière, avec maintenant le portable sur la table à côté d'eux, comme un petit cercueil. En attendant les autres. Où sont les autres, ils n'arrivent pas...Toute ma vie, j'ai attendu. Tout au long de mon enfance et de mon adolescence, recouvrait l'asphalte des pavés, et moi je grandissais, ceci allait bien ensemble. Le souvenir glissait, les poids sur le coeur se soulevaient, reprenaient leur volume initial. Aux matins, les yeux jaune trahison séparaient d'eux-mêmes et le soleil déjà chauffait à blanc. Que l'on n'en dise rien, que tout soit même oublié si possible et, au moins, jamais commenté. Le jour suivant n'est pas venu. Est-ce que c'était vraiment nécessaire.
Maintenant la nuit.

(Dominique A - Tout N'est Plus Comme Avant)

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